vendredi 1 mars 2013

Référentiels de données : piliers du SI


La nécessité d’organiser le système d’information autour de « référentiels », en anglais MDM : Master Data Management, et de les gérer en tant que tel, est reconnue de longue date par les informaticiens de terrain. Les grandes structures ont aussi pris conscience des enjeux et mis en place une gouvernance adaptée.

Une sclérose naturelle


Car l’évolution naturelle d’une entreprise, ou d'une organisation, si l’on n’y met ordre, suit des lois d’empilement, d’imbrication et d’aveuglement prospectif :
  • Empilement par petites touches successives sur l’existant : ajout de nouveaux services dans l’organisation, processus spécifiques dédiés à des cas particuliers, extension de la sémantique opportuniste pour répondre à de nouveaux besoins prosaïques, nouveaux applicatifs recouvrant pour partie des fonctionnalités existantes par ailleurs, … Plus l’entreprise est complexe, plus son patrimoine est méconnu, et plus l’empilement, dû à la méconnaissance, ou à une connaissance limitée à un voisinage réduit, sera intense.
  • Imbrication, car les relations entre les différentes composantes de l’entreprise se font, au fil des temps, par facilité et commodité du moment, sans vision globale. Ces relations d’imbrication rendent les évolutions très difficiles, voire impossibles pour un coût ou un délai raisonnables. Toutes les structurations de l’entreprise subissent cette loi naturelle, qui touche l’organisation, les processus, le SI dans ses volets données et applicatives.
  • Brouillard prospectif, car la vision réduite au niveau local l’est aussi bien au plan temporel. Absence de vue globale et de projection de cette vue à diverses échéances sous le double effet des inconnues stratégiques, et des rigidités inscrites dans le patrimoine. D’ailleurs une conscience globale et prospective, arrivé à un seuil de complexité, est-elle raisonnablement envisageable ?

Ainsi, l’entropie de l’entreprise s’accroît au cours du temps, et la menace de sclérose.
En théorie, le remède est simple : mettre en place des référentiels, une gestion des données de référence.


Les obstacles


En pratique, il y a plusieurs obstacles, de divers ordres.


D’ordre applicatif


Avec un patrimoine complexe et imbriqué, il est hors de question de le « casser » en substituant, à des données locales à telle application, à des pseudos référentiels, un référentiel nouveau et sainement constitué. Cela ne peut se faire que progressivement, avec les évolutions naturelles du patrimoine, comme le recommande l’urbanisme des SI à la française. C’est donc une opération de longue haleine, que la fébrilité et les difficultés contingentes repoussent souvent à de jours meilleurs.
  • Au cas où on a cependant admis le principe de l'urbanisme, la courte vue risque fort, par inconscience, de séquencer les projets à l’envers : par exemple, on fera passer un gros projet, bien sûr naturellement en retard, en premier, sapant d’avance tous les apports du référentiel. Au lieu de construire le composant d’architecture qu’est le référentiel en avance de phase, on le diffère. Ou bien, ce qui n’est pas nécessairement mieux, on l’embarque dans le gros projet, qui le formate alors selon sa vision égoïste.
  •  Si enfin tout est remis dans l’ordre de la partition qui doit être jouée (prévue en un schéma directeur par exemple), les risques d'effet "domino" sont forts, et les incidents de parcours, compte-tenu du rôle de « pilier » que joue un référentiel dans l’architecture des cathédrales que sont les SI, peuvent être lourds voire fatals.

Cependant, et cette note  très positive n’est pas toujours correctement connue, il existe des progiciels de MDM spécialisés, flexibles, performants. Surtout ces systèmes sont interfaçables aussi bien de façon traditionnelle avec les applications existantes qui pourront être « leurrées », qu’avec de nouveaux composants accédant en mode service, au travers d’API. Car la flexibilité de la solution est indispensable pour ne pas figer les modes d’alimentation et de consommation des données de référence.

Une autre note positive est que la fonction d’urbaniste des SI et d’architecte d’entreprise est reconnue, en particulier avec le Club Urba-EA. Il y a donc des « vigies » qui sont en position de voir global et loin. Elles disposent de méthodologies dédiées à l’EA, qui facilitent leur travail, à condition de les utiliser à bon escient.

D’ordre conceptuel


Première difficulté : Les données-informations-connaissances évoluent selon des cycles distincts, et qui doivent être nettement objectivés et dissociés, dans la terminologie :
  •  Données du monde réel
  • Architecture des informations : définition des données et de leur syntaxe (métadonnées de syntaxe)
  • Architecture des connaissances : définition des données et de leur syntaxe (métadonnées de sémantique)
Le schéma ci-après explicite cette échelle qui mène des données aux connaissances, avec les 3 cycles distincts.
Trois niveaux de modélisation


Deuxième difficulté : il existe 2 axes d’extension qui brouillent l’analyse, si l’on ne les fait pas non plus clairement apparaître :
  • Le champ sémantique qui développe à l’infini les concepts, en ajoutant de nouvelles informations, des nuances, particularités, relations, des caractéristiques,…
  •  La propriété et le partage sur ce champ et ses divers sous-ensembles (axe que l'on pourrait éclater en axes RACI, mais restons simple…)


Le schéma ci-dessous représente les 2 axes combinés avec les 3 niveaux.
Toutes ces structures sont en symbiose avec la culture, l’organisation de l’entreprise, de l’écosystème, en un mariage complexe.


De l’ordre de la gouvernance


Il est nécessaire de correctement configurer la gouvernance et la répartition des rôles de gestion. Le modèle à 3 niveaux et 2 axes permet d'instancier ces structures pour répondre au mieux aux objectifs de l’entreprise. En effet les données de référence sont de puissants leviers :
  • De cohérence, mais aussi de synergie, et d’autonomie, entre les différents opérateurs de l’écosystème,
  • De qualité des données, et donc d’excellence opérationnelle, de qualité de service,
  • De partage culturel,
  • D’image, de communication interne, de lisibilité,
  • D’analyse des activités,..

La mise en place d’une gouvernance des données de référence est ainsi un des piliers de l’Architecture d’Entreprise.

Cette gouvernance fait apparaître des jeux d’acteurs aux trois niveaux, et au cours des trois cycles, dans une organisation somme toute complexe, à géométrie variable, mais tueuse d’entropie.
Finalement ce sujet demanderait de longs développements, des exemples, le propos ici était de poser quelques bases, hélas un peu trop conceptuelles. Que le lecteur m’en excuse. Sur un sujet connexe voir sur ce site le texte sur les puits de données.

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