samedi 9 mars 2013

L’écosystème du numérique


L’informatisation des entreprises et organisations est en route depuis une quarantaine d’années, et les a profondément transformées. Cette transformation n’est pas terminée, mais les bases sont établies, l’outil informatique est incontournable pour les métiers, et ses évolutions prédictibles. D'ailleurs la complexité atteinte par le SI rend certains changements difficiles et coûteux.  Le poids du SI, la capitalisation autour des données, les bases de connaissance, les pratiques institutionnelles internes en termes de métier, de gouvernance, de procédures, constituent une bonne part du patrimoine immatériel.

A l’opposé, à l’extérieur de l’entreprise, dans le monde connecté et dans les réseaux sociaux, les mêmes techniques ont créé des usages émergents. Elles ne sont plus simplement outil d’automatisation interne, outil de la relation client, mais outil en symbiose avec le vécu, dans ce qui a été appelé ici l’intimité numérique.
Cet écosystème externe aux entreprises et organisations traditionnelles est le fait de jeunes entreprises qui se développent dans un bouillon de culture dynamique. Certes les places sont déjà prises par les grands acteurs du « search » et des réseaux sociaux, mais il y a encore beaucoup d’inventions possibles avant que ce territoire du numérique ne soit investi, couvert et stabilisé, probablement autour de monopoles.
En effet, une vision « urbanistique » du sujet (c’est là mon péché mignon, vouloir une clarté globale dépassant les projets isolés !) fait apparaître :
  • Une organisation des réseaux sociaux en silos, syndrome bien connu au sein du patrimoine SI des entreprises, imposant à l’utilisateur soit le choix de restreindre sa présence à un réseau, soit une navigation chronophage et inefficace, un « zapping » multi-réseaux,
  • Un archaïsme des médias actuels, si on se projette en une cible idéale d’ubiquité et de présence sur tout support, par tout media, et en tout mode de synchronisme ou de désynchronisme :
    • Forte limitation du nombre de caractères admis par Twitter et rusticité de l’ergonomie,
    • Difficulté d’échanger des documents, absence de correcteur orthographique,
    • Inflation des messages de tout type, se renvoyant d’un « fil » à l’autre, polluant une éventuelle capitalisation,
  • Peu de facilités transverses, comme constaté dans les patrimoines SI des entreprises dans les années 80-90 (urbanisme du SI Sasoonien en référence à Jacques Sassoon qui fut le premier à définir les principes de zonage utilisés pour cartographier le patrimoine SI, ou dans une métaphore historique Hypodamien, en référence à Hypodamos de Millet) :
    • Nécessité de s’identifier et se décrire dans chaque réseau social, d’y gérer son profil, ses connexions (amis, cercles, connectés, abonnés, …)
    • Peu de recherches transversales
    • Gestion des connaissances multimédia à mutualiser entre les réseaux
    • Gestion de la confidentialité à exiger au cas par cas                                                                                                   
Le schéma ci-après esquisse une représentation du parcours de l’internaute dans ses recherches et ses collaborations :
  • La compétition entre moteurs de recherche
  • Les silos de réseaux sociaux, chaque réseau assurant :
    • L’identification et la gestion de ses participants
    • Les services d’apport et de consultation de contenu
    • Les espaces collaboratifs qui lui sont propres
  • Une faible intégration consistant surtout à faire le lien avec les sites fournisseurs de ressources et d’espaces de partage.


Parcours de l'internaute sur les réseaux sociaux


Il ne s’agit pas ici de dénigrer la modernité et le souffle des réseaux sociaux, qui, de façon indéniable, apportent de nouvelles respirations. Bien au contraire, … il est clair que de nouveaux usages débutent. Ils seront encore plus accélérés par les objets connectés dont la présence deviendra naturelle, utile et non futile, infinie en variété et de tous les instants,  sur de multiples formes à l’avenir !

Dans ce bouillon de culture de l’écosystème du numérique, non seulement les différents silos se reconfigureront, par création, fusions, rachats, ne serait ce que pour répondre au besoin de convergence entre les medias, et d’amélioration d’une ergonomie encore fruste, mais les fonctions transverses, qui sont stratégiques pour capter le trafic, gagneront en pertinence, et s’adapteront par exemple au profil de l’utilisateur, aux thématiques qui le motivent.

Il ne s’agit pas non plus de faire le schéma directeur du numérique : le processus de création et de disparition darwinien est en route, sur un territoire mondialisé. Mais les entreprises et organisations doivent anticiper ces évolutions. En particulier elles devront profiter de la dynamique de ces multiples connexions, et des atouts des réseaux sociaux.

Le véritable dilemme sera alors :
  • Soit de créer, pour les seuls besoins de l’entreprise ou de l’organisation, un écosystème numérique dédié, écosystème bien intégré au SI « maison », mais déconnecté des divers espaces collaboratifs publics,
  • Soit de bénéficier des acquis des réseaux sociaux, de leur visibilité,  au risque que le SI « maison » y soit mal intégré.


Ce sujet sera l’objet d’un prochain message.

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